Tout ne commença sans doute pas en 1479, mais le traité d’Alcáçovas signé cette année là a posé les bases d’un système qui perdure jusqu’à aujourd’hui.



Ce traité dont le but était de mettre fin à la guerre de succession de Castille comportait une clause qui déterminait le partage des territoires de l’Atlantique entre la Castille et le Portugal :

  • la Castille conservait la souveraineté sur les Iles Canaries.
  • le Portugal conservait la souveraineté sur les îles de Madère, des Açores et du Cap Vert.
  • le Portugal conservait le contrôle exclusif de la région côtière de l’Afrique occidentale (appelée Guinée), dont le comptoir d’Elmina ainsi que l’exclusivité de la conquête du royaume de Fès.

Pourquoi cette nécessité d’ajouter cette clause au traité ?

Parce qu’en 1434 le Portugais Gil Eanes parvint à doubler le très redouté cap Bojador situé au Sahara occidental, ouvrant ainsi l’accès à l’Afrique sub-saharienne aux Portugais.



10 ans plus tard la première cargaison d’esclaves arrivait à Lagos, au sud du Portugal.
Cette nouvelle route donnait aussi un accès direct à l’or africain sans devoir passer par les Arabes.
Les Castillans voyant les Portugais s’enrichir à vitesse grand V, voulurent leur part du gâteau.
Les Portugais, soucieux de préserver leurs intérêts, voulurent que leurs découvertes soient validées sur le papier.

Source Wikipedia :
Le Traité d’Alcáçovas est un texte fondateur dans l’histoire du colonialisme. En effet, c’est le tout premier des documents internationaux qui formalise explicitement le fait que les Européens s’attribuent le pouvoir de diviser le reste du monde en “sphères d’influence” et d’en coloniser les territoires, considérés comme terrae nullius, sans se soucier du consentement d’éventuels peuples autochtones. Ce principe va rester généralement admis dans les idéologies et les pratiques des Européens jusqu’aux décolonisations du XXe siècle.

13 ans après la signature de ce traité, Christophe Colomb traverse l’Atlantique.

La Castille et le Portugal éprouvent alors le besoin de re-préciser les règles établies par le traité l’Alcaçovas pour les découvertes à venir.

Elles seront redéfinies en 1494 dans le cadre du traité de Tordesillas qui sépare l’Atlantique en deux à partir d’une ligne imaginaire positionnée à environ à 2 000 km à l’Ouest du Cap Vert.



Découpe du monde par le traité de Tordesillas.

Sur la carte ci-dessus, nous voyons, en vert clair, la moitié du monde attribuée au Portugal, en vert foncé, la part attribuée à la Castille.

Si les Français, Anglais et Hollandais ne sont pas invités au festin, c’est tout simplement parce qu’à cette époque il n’avaient pas de flottes capables de rivaliser avec les Portugais et les Espagnols. Ils ne regardaient pas du côté de l’océan, trop occupés à se battre pour la conquête des terres européennes.

C’est sur la base de ces traités que Charles Quint se laissa convaincre par Magellan de faire le tour de l’Amérique pour tenter d’accéder aux fameuses épices.


Le monde à l’époque de Charles Quint.

Depuis Christophe Colomb, les voyages vers ces nouvelles contrées, où les Castillans et les Portugais rencontrèrent des populations technologiquement inférieures, provoquèrent nombre débats et discussions dont le point culminant fut la controverse de Valladolid en 1550/1551 qui se déroula sous l’égide d’un représentant du pape.
Malgré leurs tentatives de ne pas autoriser la mise en esclavage des populations rencontrées, décret de Charles Quint en 1526, bulle papale en 1537, les affaires étant les affaires, les rois et papes avaient fini par s’incliner devant la réalité économique.
Censée établir les droits des Indiens, la conférence de Valladolid eut pour principale conséquence le développement frénétique de la traite d’esclaves à partir de l’Afrique.


Animaux ou humains ? Tel était le débat à l’époque.

Les nouveaux maîtres ayant besoin de main d’oeuvre se rabattirent sur les Africains considérés comme plus résistants. De plus, s’il y avait débat à l’époque pour savoir si les Indiens étaient ou pas des enfants de Dieu, la question ne se posait pas pour les Africains, ce qui permit à la traite de se développer intensivement.

Cette idée de partage du monde entre puissants trouva son prolongement 400 ans plus tard dans les résolutions de la conférence de Berlin en 1885, à laquelle ont pris part l’Allemagne, l’Autriche-Hongrie, la Belgique, le Danemark, l’Empire ottoman, l’Espagne, la France, la Grande-Bretagne, l’Italie, les Pays-Bas, le Portugal, la Russie, la Suède-Norvège ainsi que les États-Unis.

Cette conférence avait pour but in fine de trouver un terrain d’entente pour se partager l’Afrique.

5 mois après la clôture de cette conférence, Jules Ferry, déclarait à la tribune de l’Assemblée nationale, le 28 juillet 1885 : « Messieurs, il faut parler plus haut et plus vrai ! Il faut dire ouvertement qu’en effet les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races inférieures […] parce qu’il y a un devoir pour elles. Elles ont un devoir de civiliser les races inférieures. »

Sur la même idée, les Français et les Britanniques se partagèrent la domination d’une grande partie du Moyen-Orient en 1916 dans le cadre des Accords Sykes-Picot.

Léon Blum, au Parlement, le 9 juillet 1925 : « Nous admettons qu’il peut y avoir non seulement un droit, mais un devoir de ce qu’on appelle les races supérieures, revendiquant quelquefois pour elles un privilège quelque peu indu, d’attirer à elles les races qui ne sont pas parvenues au même degré de culture et de civilisation. »

Près de 500 ans après le traité d’Alcaçovas, en 1944, le Comité Français de libération nationale sous la présidence du Général de Gaulle, organise la conférence de Brazzaville qui doit préparer l’après-guerre. Les quelques Africains présents le sont à titre d’observateurs.



Les conclusions de la conférence sont claires : « toute idée d’autonomie, toute possibilité d’évolution hors du bloc français de l’Empire : la constitution éventuelle, même lointaine, de self-governments [auto-gestion] dans les colonies est à écarter ».

La conférence de Yalta, dite aussi conférence de Crimée, a suscité et suscite toujours les plus grands débats. L’interprétation la plus fréquente aujourd’hui encore est celle du « partage du monde », de l’accord entre les Etats-Unis et l’URSS pour diviser l’Europe. Ce mythe, popularisé en France dès 1947 par le général de Gaulle, qui n’avait pas été invité à Yalta, renvoie à la vision de la « double hégémonie » américano-soviétique, censée avoir dominé les relations internationales après 1945.
G-H Soutou

Plus près de nous, au mois de février 2020 aux Etats-Unis un procureur blanc a considéré que le meurtre par 2 blancs [dont un policier en retraite] d’un jeune noir qui faisait son jogging était de la légitime défense (les 2 blancs armés d’un fusil et d’un revolver poursuivaient le jogger en pick-up) et a décidé de ne pas les inculper considérant leur meurtre comme une “arrestation citoyenne”. Il a fallu plus de 2 mois et la mobilisation de membres en vue de la communauté noire, pour qu’un grand jury décide de les inculper de meurtre.

Est-ce que le monde change ?

Lorsqu’on achète aujourd’hui 5€ un t-shirt fabriqué au Bangladesh nous préoccupons nous vraiment des conditions de vie et de travail dans ce pays ?

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Sommes nous vraiment différents des générations qui nous ont précédé ?