11/12/2020
Bonjour,
Une question qu’on me posait de temps en temps : c’est quoi ton budget ?
Autre question sous-entendue : comment il est financé ?
Il y a environ 2 semaines j’ai été contacté par une prof de seconde. Les Grandes Découvertes sont à leur programme. Ses élèves, charmants geeks qui pensent inconsciemment que les smartphones [merci Steve] ont toujours existé, avaient beaucoup de questions à me poser et auraient aimé organiser une visioconférence entre eux en classe et moi sur mon bateau. J’ai répondu à cette professeure que le budget qui me permettait d’être là aujourd’hui était inférieur au coût du matériel nécessaire pour pouvoir faire une visioconférence à partir d’un bateau.
Eh oui, il y a plusieurs planètes, celle du Vendée Globe par exemple où ce type de prestation est possible et celle de l’armada de gens qui naviguent avec moins de moyens. Il faut de tout pour faire un monde.
Au départ de l’Aber Ildut, mon budget était de 18 000 € tout compris : achat du bateau, renouvellement du matériel, de l’équipement, changement du gréement, achat de matériel spécifique comme le routeur Iridium Go [qui permet d’envoyer et recevoir les posts, des mails, des SMS, de téléphoner] achat de nourriture pour 3 mois environ.
Budget de fonctionnement : je paie 175 € par mois pour vous envoyer les posts quotidiens qui font vivre la traversée. Ce montant comprend l’ensemble des prestations qui utilisent le réseau satellite. Les frais de gestion mensuels de l’association Sillages sont de 80€.
Voilà vous savez tout.
Seconde question : d’où vient l’argent ?
Printemps 2019. Je suis invité à Mezos dans les Landes pour présenter mon projet de dérive dans l’Atlantique et le film Marées noires. A la rentrée de septembre je dois admettre que je ne parviendrais pas à monter ce projet. Pour me vider la tête, je me plonge dans l’histoire des Grandes Découvertes et j’arrive inévitablement sur Magellan.
Je dévore tout ce qui me tombe sous la main, en particulier la bible au niveau Magellan : Le Voyage de Magellan aux éditions Chandeigne. Si vous voulez une histoire bien racontée, lisez Magellan de Stefan Zweig, mais si vous voulez tout connaître de ce voyage, lisez le Voyage de Magellan.
Bref, j’avance dans ces lectures et finis par me dire : tu vas avoir 73 ans, tu n’as jamais fait le tour du monde, et si tu refaisais le parcours de cette expédition. Ça mûrit et lors d’un échange avec une personne rencontrée à Mezos, on en parle et elle me dit : “Si tu veux je te prête 10 000 € pour ce projet, tu me les rendras en 2024.”
Et là c’est parti. Recherche d’un petit mais bon bateau pas cher. Je finis par trouver cet excellent Dufour 2800 à Brest. 10 000 € ce n’est pas suffisant pour partir. J’emprunte 4 000€ sur 2 ans, arrive, je ne sais pas trop comment à mettre 2000 €, les 2000€ restants provenant d’adhésions à l’association Sillages [10€ par an] et de dons.
Voilà comment on en arrive à tenter de doubler le Cap San Roque au Brésil.
Tout cela est rendu possible par le soutien indéfectible de Klau, ma compagne qui pourtant déteste que je parte, de sa fille Morgane qui de Belgrade où elle habite, se démène pour alimenter [quel talent !] Facebook et Instagram afin que les uns et les autres puissiez suivre ce voyage, de Morgan un de mes fils, qui gère le site internet, de Guy, météorologue qui me guide de Tahiti où il réside et de Xavier, un de mes frères, qui m’envoie des infos météo quand Guy n’est pas dispo.
Fred, également de Profs en transition, Gilbert de Lampaul, mécano hors pair et Maurice, sorcier de l’Open CPN. Et bien entendu, la personne rencontrée à Mezos qui a porté ce projet sur les fonds baptismaux. J’oublie quelqu’un bien sûr, qu’il ou qu’elle me pardonne.
Des classes suivent ce voyage, pour moi c’est vraiment important. Ces voyages n’ont d’intérêt que s’ils apportent aux autres.
Latitude, longitude, tropiques, milles marins, droits de l’homme, mondialisation, il y en a des choses à raconter autour de l’expédition de Magellan.
C’est ce que je vais m’efforcer de faire tant que ce voyage continue.
Si cela vous parle, vous intéresse ou vous touche, n’hésitez pas à soutenir ce projet artisanal sans aucune pub.
N’oubliez pas que l’Etat vous remboursera les 2/3 de votre participation.
Une manière cool d’orienter la dépense publique.
Allez, on y retourne, il faut doubler San Roque…
Jo Le Guen