14 août 2021
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Il y a quelques nuits une jeune femme présentée par la presse comme “parisienne” a tagué le monument érigé à Lisbonne en hommage aux grands navigateurs portugais des XVème et XVIème siècles, leur reprochant d’être partis sur les océans inconnus motivés par le seul appât du gain.
“Blindly sailing for money, humanity is drowning in a scarlet sea”,
littéralement :
“partie aveuglément à la conquête de l’argent, l’humanité sombre dans une mer écarlate”.
https://www.ouest-france.fr/…/a-lisbonne-le-tag-dune…

Le Portugal avait et a toujours, à l’est et au nord la puissante et ambitieuse Espagne, à l’ouest et au sud l’océan Atlantique.
Les pays européens étaient alors occupés à des guerres intestines se disputant âprement les territoires.
A part Venise et Gênes occupées par leurs fructueux échanges à travers la Méditerranée, personne ne s’intéressait vraiment à l’océan sur lequel l’église catholique avait d’ailleurs interdit de naviguer.
Le monde océanique s’arrêtait aux Canaries et à Madère.
Pour se développer, voire pour survivre sans être absorbés par l’Espagne, les Portugais n’avaient qu’une possibilité, s’aventurer sur l’océan aussi redouté qu’inconnu.
Ce que fit ce petit pays d’un million et demi d’habitants.
Il y trouva la fortune et fit basculer le monde dans l’ère de la mondialisation, bouleversant à jamais la vie des populations rencontrées qui n’avaient pas les connaissances technologiques des européens, ce qu’ils payèrent au prix fort.
Il serait indécent de jeter la pierre aux seuls portugais, car quand les pays du nord, la France, l’Angleterre et les Pays-Bas, virent les richesses s’accumuler à Lisbonne, ils se dépêchèrent d’armer des flottes pour avoir leur part du gâteau et manquèrent tout autant de tendresse envers les populations locales. N’oublions pas l’Espagne qui avait cinglé vers l’ouest, la navigation autour de l’Afrique lui ayant été interdite par l’église.
Qu’aurait fait cette tageuse parisienne à cette époque ?
Elle ne se serait pas embarquée sur un bateau puisque la présence des femmes y était interdite *, mais son père, son frère, son compagnon, qu’auraient-ils fait à cette époque ?
J’ai souvent pensé, qu’en tant que marin vivant au XVIème siècle, j’aurais très bien pu me retrouver sur un navire négrier, du bon côté du manche bien sûr.
Qui peut affirmer le contraire ?
Ne jugeons pas les gens des siècles passés avec les modes de pensée d’aujourd’hui.
Chacun de nous profite sans état d’âme d’une main d’œuvre payée misérablement [ne parlons pas de leur protection sociale], que ce soit pour nos t-shirts, nos Nikes, nos I phones et toute une palanquée d’objets que nous nous émerveillons de trouver à bas prix.
Quand ce n’est pas le cas, la marge est allée dans la poche des déjà nantis pas dans celle des petites mains qui les fabriquent.
La palme d’or du jugement totalement indécent revient à l’Allemagne qui, ayant apparemment du mal à sortir d’un traumatisme au long cours, n’a trouvé rien de mieux que de juger des nonagénaires et un centenaire parce qu’à 17 ou 18 ans, ils n’avaient pas eu la bonne idée de dire non au nazisme et de se prendre une balle dans le dos en tant que déserteur.
Imaginez leurs procureurs ou leurs juges le matin devant leur miroir dans leur salle de bain.
Ils ont bien du se demander au moins une fois ce qu’ils auraient fait eux à la place de ce gamin de 17 ans qu’ils jugent aujourd’hui.
Pas un n’a pu penser un seul instant que lui-même, du haut de ses 17 ans, se serait opposé à la machine nazie.
En acceptant de juger ces vieillards, ils se sont couchés, pas pour sauver leur peau comme l’ont fait ces gamins, mais pour préserver un plan de carrière. Quel courage !

* La première femme à avoir fait un tour du monde, de 1766 à 1769, est une française Jeanne Barret.
Botaniste de formation et compagne du naturaliste de l’expédition montée par De Bougainville, elle dut se déguiser en homme pour pouvoir embarquer en tant « qu’assistant » sous le nom de Jean Barret. il est probable que De Bougainville était dans la confidence, mais l’histoire ne le dit pas.